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briques accueillants des abeilles
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Le lab

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Au Royaume-Uni, Brighton devient la première ville bee-friendly

4 min

Description

En Angleterre, la ville de Brighton a décidé de rendre obligatoire l’installation de briques pour accueillir des abeilles solitaires sur tous les nouveaux bâtiments de plus de cinq mètres de haut. L’objectif : permettre aux abeilles de faire leur nid en ville et favoriser la biodiversité en milieu urbain.

Components

Elles ne produisent pas de miel mais sont d'excellentes pollinisatrices. Les abeilles solitaires font leur nid dans la terre, du bois mort ou encore dans les petites cavités des maisons.

Chiffré clé

Au Royaume-Uni, on en comptabilise environ 250 espèces.

Menacées par le réchauffement climatique et l’agriculture intensive, les abeilles solitaires peuvent parfois trouver refuge en ville. “Dans les espaces urbains, je pense qu’il y a une opportunité pour les abeilles de prospérer car l’environnement peut s’avérer être moins toxique par rapport aux territoires ruraux. Cela s’explique en raison de l’agriculture intensive car il y a souvent des tonnes de pesticides qui sont répandues”, constate Lars Chittka, professeur d'écologie sensorielle et comportementale à l’Université Queen Mary de Londres.

Pour participer à préserver les abeilles solitaires, Brighton et Hove ont rendu obligatoire l’installation de briques pour abeilles sur les nouveaux immeubles de plus de cinq mètres de haut. Conçues à partir de 75% de déchets recyclés d’une usine de kaolin britannique, ces briques imaginées par l’entreprise Green&Blue sont faites de trous de plusieurs dimensions pour accueillir les abeilles. Ces dernières doivent pouvoir pondre leurs œufs à l’intérieur des petites cavités. Une initiative plutôt positive selon Lars Chittka :

“Dans un environnement urbain très ordonné où tout est propre, il y a moins d’opportunités pour les abeilles de faire leur nid donc l’idée de leur mettre à disposition des espaces de nidification dans chaque nouvel immeuble est bonne mais nous ne connaissons pas encore les risques”.

Toutefois, puisque le projet est inédit, il reste encore difficile d’évaluer de manière très précise l’efficacité de ces briques pour la biodiversité en ville. Plusieurs spécialistes attendent en effet de constater leurs effets pour juger de leur pertinence.
Certains imaginent que des acariens pourraient venir se nicher dans les cavités et que des maladies seraient susceptibles de s’y développer. “Il y a aussi le risque qu'il y ait beaucoup d'araignées qui attrapent les abeilles au moment de la nidification, je pense que cela nécessite juste une certaine surveillance”, souligne Lars Chittka. “D'autres (scientifiques) ont également souligné que si ces nids sont utilisés année après année et s'il y a des maladies parasitaires, cela pourrait se propager d'une génération à l'autre. En théorie, c'est une préoccupation valable, mais en même temps, lorsque les abeilles sauvages décident de se nicher dans un trou préexistant, elles évaluent si l'endroit est approprié. Il y a un processus d'autorégulation en principe où les abeilles évitent les endroits pendant un certain nombre d'années avant qu'ils ne soient de nouveau habitables”. Pour le professeur, un gel hivernal pourrait par exemple permettre d’éliminer les maladies, précisant que les abeilles peuvent aussi dans certains cas être amenées à nettoyer certaines infestations.

Permettre aux urbains de cohabiter avec les abeilles

La professeure d’écologie de l’Université de Nottingham, Sophie Evison, estime qu’il est probable que des maladies se concentrent dans les cavités. La spécialiste s'interroge aussi sur la dimension des trous imaginés par les concepteurs de la brique. Selon elle, leur taille pourrait ne pas être adaptée aux espèces d’abeilles solitaires qui pondent leurs œufs dans ce type de matériaux. Cependant, Sophie Evison voit cette initiative comme une bonne manière de familiariser les citadins avec les abeilles sauvages :

"L'avantage, même si ce n'est pas tout à fait au point pour attirer beaucoup d'abeilles, c’est que cela va sensibiliser à la nécessité d'avoir des sites de nidification pour les insectes utiles en milieu urbain et si vous n'avez pas de jardin, vous pouvez placer un nid dans votre mur et je pense que beaucoup de gens n'y ont peut-être pas pensé".

Un avis partagé par Lars Chittka qui imagine que cette initiative pourrait avoir une visée éducative : “Très peu de gens ont aujourd'hui un lien avec la nature et je pense qu'il existe une opinion persistante selon laquelle tous les insectes sont soit dégoûtants, soit dangereux, explique-t-il. Ces briques sont dans un endroit où les gens peuvent faire des observations sur les abeilles et les comportements sont souvent fascinants. Si les gens mettent des tableaux d'information ici et là pour expliquer quelle est la valeur de ces briques, quel genre d'espèce ils pourraient y découvrir, cela pourrait être une campagne d'information très précieuse.” 

S’il n’est pour le moment pas facile de déterminer de manière très précise quel impact cette initiative pourrait avoir sur la biodiversité en ville, le professeur estime qu’il est nécessaire d'en faire l’expérience sur une période de trois à quatre ans pour en tirer des conclusions. “Je ne vais pas décourager les urbanistes de Brighton d'aller de l'avant avec leur projet mais je pense qu'il sera bon de surveiller quels sont les avantages et les risques réels avant que cela ne soit copié dans d'autres villes.